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Les milliards du foot, la misère de l’université

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Ainsi donc, Canal + et BeIn Sports vont payer quelque 750 millions d'euros par an aux clubs de football français pour diffuser leurs matches. Soit près de trois milliards sur quatre ans. Sans parler de nouvelles sommes mirobolantes à verser pour acquérir les droits télévisuels des matches de Coupe d'Europe.

Et pendant ce temps-là, nos universités sont à la diète, qui pourraient créer des milliers d'emplois - on sait en effet que chaque euro investi dans l'éducation supérieure possède un puissant effet multiplicateur, et produit trois ou quatre autres euros. Partout, on rogne sur les dépenses, on limite les recrutements, on repousse les investissements.

Pour le foot et les footeux, l'argent sans limite

Ainsi donc, la France, ses collectivités locales, ses clubs, ses pouvoirs publics (et ses contribuables...) sont également en train de dépenser - on n'ose écrire "investir" - plus de deux milliards d'euros pour construire des stades - à Lille, Lyon, Nice et Bordeaux par exemple - ou pour les rénover - comme à Marseille, Toulouse, Paris ou Lens. Des stades qui, le plus souvent, ne seront pleinement utilisés que trois ou quatre fois par an... Et qui, là encore, bénéficieront avant tout au même sport, le football.

Et pendant ce temps-là, le budget total de l'enseignement supérieur et de la recherche atteint péniblement 26 milliards (pour rappelons-le, quelque 2.400.000 étudiants). La précédente ministre se réjouissait, il y a quelques mois, de pouvoir annoncer une hausse de son budget de 0,5 %. Les clubs de foot, eux, viennent d'obtenir... plus de 20 % d'augmentation pour autoriser la retransmission de leurs matches.

Ainsi donc, personne ne trouve rien à redire à cette situation ? Pas une voix ne s'élève pour trouver cela délirant, et pour tout dire obscène ?

Entendons-nous bien : il est tout à fait possible d'aimer le foot - le foot que des millions d'amateurs, licenciés ou non, pratiquent comme un loisir, mais aussi le foot-spectacle, celui des grandes soirées de Coupe d'Europe ou des grands matches de la Coupe du Monde - on peut très bien, donc, apprécier le football et trouver pourtant très, très excessives les montagnes d'argent que notre société déverse sur quelques centaines de professionnels de la balle ronde. Le spectacle serait-il forcément moins passionnant si leurs salaires étaient divisés par deux ou par quatre ? Nos meilleurs footeux iraient alors taper la balle sous d'autres cieux : et alors ? Le "suspense" du championnat français en serait-il diminué pour autant ? Plus largement, ne faudra-t-il pas un jour s'interroger sur la place que commence à prendre le foot - et le sport en général - dans notre société ? Allons-nous suivre la voie qu'empruntent dans ce domaine nos voisins espagnols ou italiens ?

Certes, comparaison n'est pas raison. Mais avec trois, quatre ou cinq milliards d'euros, combien d'universités ou d'écoles pourrait-on construire ? Combien de bourses d'étudiants pourrait-on financer ? Combien de laboratoires ? Combien de profs pourrait-on payer ? Entre l'éducation et le foot, la France a choisi - sans le clamer sur les toits. Et ce choix en dit long sur l'état de notre société.


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